La société vous va si mal
Sorti juste avant le deuxième confinement en France, Adieu les cons, septième film d’Albert Dupontel, a été l’une des seules sorties cinéma de la rentrée 2020. Que vaut cette nouvelle critique de la société, genre si cher à l’humoriste/réalisateur/comédien?
Bonjour les stéréotypes
Dupontel aime critiquer la société, et ses personnages sont souvent des victimes directes de ce qu’il souhaite nous montrer. « Adieu les Cons » ne déroge pas à cette règle. Dans sa nouvelle oeuvre, le réalisateur de « Au revoir là-haut » nous sert une critique acerbe des politiques, policiers, fonctionnaires, cadres (représentant « les cons »), capables de broyer tout le monde sur leur passage.
Les broyés en question, ce sont les trois personnage principaux de l’intrigue. Jean-Baptiste Cuchas (A. Dupontel), un fonctionnaire obsédé par la sécurité informatique, en pleine dépression. Suze Trappet (Virginie Efira), une coiffeuse dont les jours sont comptés. Et M. Blin (Nicolas Marié), arichiviste, ancien agent EDF victime de violences policières qui l’ont rendu aveugle.
Ces personnages resteront enfermés dans leurs stéréotypes toute la durée du long métrage, pour servir un conte glaçant et grinçant sur nos temps modernes.
Adieu la subtilité
L’intrigue est simple: Suze, qui vient d’apprendre que sa vie est en sursis, se met à la recherche de son enfant né sous X. Par un concours de circonstances d’une tristesse qui n’a d’égal que sa loufoquerie, elle croise le chemin de J-B., qui va lui prêter main forte dans sa quête. M. Blin leur viendra en aide, et sera également l’occasion d’utiliser sa cécité comme base de certains gags plus ou moins drôles.
Ainsi, sur leur chemin se dresseront les méchants policiers, qui enchainent les bavures, des fonctionnaires qui ont plus l’air de prendre des pauses cafés que des pauses travail, et autres stéréotypes.
Alors oui, ça manque de subtilité. Il n’y en a même aucune. Mais pour une bonne raison. Ces fils grossiers permettent de se concentrer sur l’impact que peuvent avoir nos organisations modernes sur les personnes en marge de notre société.
Lorsque nous ne nous occupons plus de ce qui importe, mais que nous nous laissons porter par l’inutile, que deviennent les dépressifs, les malades et les handicapés? Bref, ceux en position de « faiblesse », alors que nous sommes à la recherche de la performance à tout prix? Voilà le message que veut porter Albert Dupontel.
Bien vu l’aveugle
Et ça marche. Aussi simple que puisse paraître l’intrigue d' »Adieu les cons », et aussi simpliste que puissent paraître les personnages, ça fonctionne.
Nous nous attachons à notre trio de circonstance, et vivons avec eux leurs mésaventures sur fond de chaos moderne.
La réalisation est aussi tape-à-l’oeil que la construction des protagonistes. Albert Dupontel se sert de la photographie comme d’un quatrième personnage, nous montrant sans aucune subtilité les travers de notre monde. Mais manque de subtilité ne veut pas dire manque de beauté ou de poésie. Certains plans sont d’un graphisme transmettant des émotions souvent contradictoires. Ce faisant, ils poussent le spectateur à se détacher de l’histoire et à réfléchir sur ce qui nous entoure.
Alors, on a aimé?
Oui, pour son message porté et sa réalisation ouvertement excessive. Et les gags dont Albert Dupontel a le secret restent efficaces. Et quel bien fou cela fait de rire devant un écran de cinéma en ce moment!
Un peu moins pour les stéréotypes, les accusations grossières, notamment envers la police et les fonctionnaires. Moins d’amalgames ne serait pas un mal.
Alors je ne vais pas vous dire d’aller au cinéma maintenant. Mais je pense que le 15 décembre certains exploitants de salle devraient encore le projeter. Rien que pour ça, foncez!
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